Atelier de fabrication de seed balls (bombes de graines)
Publié le juillet 13, 2011
Un terrain vague miteux et triste qui vous désole?
Une subite envie de fleurs dans ces enfers verts que sont les espaces "verts" des villes?
Pourquoi pas des salades sur ce rond-point?
Le jardin de votre voisin est moche à mourir, il lui manque de la couleur?
Une solution facile, pas chère, et tellement fun : Les bombes de graines!
Pour les premières journées porte-ouvertes du Jardin d’Amarante à Mésinges (charmante et pittoresque bourgade à côté de Thonon-les-bains, 74), j’ai tenu un stand de présentation de la permaculture mais surtout un modeste atelier de fabrication de "seed-balls" ou en français de "bombes de graînes".
C’est une version moderne d’une technique d’enrobage de graine par de l’argile. Son créateur est le japonais Masanobu Fukuoka , né en 1913 et pionnier de la permaculture, de l’agriculture naturelle ainsi que de la stratégie agricole du "non-faire". Il a compris avant tout le monde que l’observation et la patience pouvait résoudre bien des problèmes. Même sans apport extérieur, sa méthode d’agriculture a pour principal effet d’enrichir le sol plutôt que de l’épuiser. Sa ferme est ainsi devenue très connue et visitée par des personnes du monde entier, lui a écrit moultes ouvrages passionnants et a été conférencier jusqu’à la fin de ses jours.
Fukuoka-san avait un problème avec ses semences de riz qui pourrissaient parfois après le semis ou qui étaient systématiquement dévorées par les oiseaux. Il a alors imaginé la technique suivante :
"la semence est étalée sur un plateau ou une panière que l’on secoue dans un mouvement de va-et-vient circulaire. On la saupoudre d’argile finement pulvérisée et on ajoute de temps en temps une fine buée d’eau. Cela forme de petites boulettes d’environ un centimètre de diamètre."
Cette technique a été remise au goût du jour pour une autre raison, bien éloignée de son origine zen : la guerilla jardinière!
La Guerilla jardinière (ou Guerrilla Gardening) est une forme d’action directe, politique utilisant le jardinage comme moyen d’action écologiste. Il défend le droit à la terre, la réforme agraire, et la permaculture. En bref c’est une sorte de réappropriation de l’espace public urbain (friches, zones industrielles, espaces verts) par des citoyens désireux de remettre la nature en ville, avec en filigrane des questions brûlantes sur l’autonomie alimentaire des villes, la place du beau dans la cité et sur la propriété privée mal gérée.
Mais c’est avant tout très amusant et délicieusement subversif!
Quel plaisir de balancer joyeusement des billes, boulettes (ou voire balles pour les plus extrêmes) riches en fleurs, légumes et autres céréales qui vont germer à l’abri de l’argile, grandir et refleurir la cité pour le plus grand plaisir de tous et certainement au plus grand étonnement de la plupart!
En effet l’argile protège les graines lors de la retombée sur le sol, elle conserve une certaine humidité à l’intérieure de la boulette et protège des rayons du soleil. Lors des premières pluie, la boulette se dissout lentement et la graine peut alors germer, bien entourée qu’elle est dans son cocon nutritif. Dès que la radicule (petite racine primitive de la plantule) touche le sol, c’est gagné!
La méthode moderne de fabrication des billes est bien plus sympathique car très salissante, ingrédients :
2/3 d’argile (ou de terre très argileuse)
1/3 de terre du jardin, avec éventuellement un peu de terreau ou de compost
un mélange de graine adéquat.
On mélange le tout et on humidifie le trésor jusqu’à avoir une consistance épaisse. On roule ensuite avec délice les boulettes d’argiles gluantes dans ses paumes. Si la structure est trop sèche (difficile à rouler, ne se tenant pas) on rajoute un peu d’eau, si elle est trop humide, on rajoute un peu de terre. Les proportions dépendent évidemment du type de terre et d’argile. L’expérience vaut toutes les recettes comme disait ma grand-mère.
La dimension des boulettes dépendra des variétés de plantes semées : petites graines, petites boulettes, et vice et versa. Mais d’ailleurs, la question vous brûle les lèvres : que semer? Réponse : à peu près tout (les pommes de terre feront toutefois des boules hasardeuses). On fera attention à balancer des variétés correspondant à l’époque : un vigoureux jet de tournesols au mois de septembre n’aura pas plus d’effet qu’un jet de tomates au mois de février.
Le facteur limitant reste toutefois l’imagination du guerilleros potager : suivant le contexte on peux faire le choix d’une salve potagère ( salades, choux, carottes, betteraves, …) ou d’un tir fleural (oeillet, marguerites, cosmos, …).
Un visiteur m’a d’ailleurs soumis l’idée perverse de faire des bombes désagréables et envahissantes à base de ronces, orties et autres piquantes. J’ai trouvé l’idée merveilleuse.
Astuce1 : le rayon "graines germées" de votre magasin bio le plus proche propose un choix extrêmement varié ainsi que de grandes quantités pour chaque emballage pour un prix parfois ridicule. Et la qualité germinative des graines est maximale vu que c’est leur boulot
Astuce2 : sur les rayons des jardineries fleurissent depuis quelques années des mélanges de graine déjà préparés avec des thématiques bien spécifiques : prairie fleurie, fleurs mellifères, annuelles, vivaces, engrais verts, … voilà de quoi couvrir quelques centaines de m2 à peu de frais!
Astuce3 : pour optimiser l’espace dans le cas de semis sauvages de légumes, on peut choisir un mélange agronomiquement efficace :
une légumineuse : enrichi naturellement le sol en azote et donc "nourri" en quelque sorte les plantes a proximité (haricot nain, trèfle, …)
un légume feuille : friand en azote -ça tombe bien- avec un enracinement superficiel et une durée de vie assez courte (salade, poirée, …)
un légume-racine : enracinement en profondeur (donc pas le même territoire de prospection que la salade ni les mêmes besoins en éléments), durée de culture plus longue (carottes, betteraves, panais, …)
On étale donc dans le temps et l’espace ses cultures pour une même bombe.
Les bombes de graines investissent la planète entière depuis quelques années. Elles prennent des formes les plus diverses et peuvent même être larguées par avions dans des capsules high-tech pour reverdir un pays de manière "industrielle"
(conceptuel, hein?), et on en fait même de délicieuses recettes gastronomiques!
A quand des distributeurs de seedballs??
Article du Net : prise2terre wordpress